L'ENFER, C'EST LES AUTRES

Nous voila.

Douze cuisiniers en devenir, enfermés dans une cuisine pour huit mois. Douze marins d'eau douce sur un navire trop petit, douze prisonniers aux travaux forcés. 12. Un joli chiffre, et pourtant.

Dès le départ nos phrases anodines révélaient nos craintes : « finalement ca va, il est bien le groupe ». Face à nos trognes intimidées par la présence de gens inconnus, nous discernions déjà un juste équilibre entre les déconneurs moyens, les femmes translucides, les timides chiants et le demeuré. C’était sans compter l’avertissement avisé de notre chef, formateur, bwana (celui qui a toujours raison) : « attention, les masques tombent ». « Rooooohhhh », lui avons-nous répondu confiants. Mais bwana en a vu d’autres, hé, des tas même. Il n’en est pas à son premier groupe de douze. Lui, douze, il connait, il sait que ca peut finir dans le sang.

Nous blogons donc ici bas afin d’exorciser ce qui est sur le point de dégénérer. La plume en soulage certains, en révèle à d’autres. Nous voilà à trois réunis autour du projet commun de ne pas sortir nos armes blanches à d’autres desseins que de tailler une julienne de céleri rave conforme. Car cela fait déjà quatre mois, et nous ne pouvons que confirmer ce que Jean-Paul Sartre avait déjà perçu avant nous : l’Enfer, c’est les autres.

1-      La France tu causeras bien

« Donne moi la », « mets le pas la », et autre « passe moi le » sont monnaie courante dans la monde merveilleux de la cuisine. Allez-y, taxer moi de snobirnarde, je m’en tamponne. Je note d’ailleurs que les quelques uns nés hors frontière sont finalement ceux qui parlent parfois le mieux.  Donc quand les deux fachos en puissance nous font la leçon sur les arabes feignants, les noirs qui sentent et les chinois sournois (sans scrupule et devant les concernés), j’ai bien envie de la leur mettre la petite dictée, comme ca, à froid, juste pour voir s’ils l’aiment vraiment la France.

2-      Des blagues salaces  et redondantes tu feras

A croire que personne ne « se soulage » dans cette profession.  Ben oui, c’est comme les frites Mc Cain (pas monsieur), c’est ceux qui en parlent le moins qui en mangent le plus. Et la, bon dieu que ca parle ! La moindre flaque d’eau nous génère un « elle a mouillé partout ° », chaque carotte/navet/concombre ou toute forme oblongue appelle une comparaison avec les phallus tous plus gros et performants de nos collègues °, la liste des verbes délicats à employer s’allonge de jour en jour (à bannir : écarter°, glisser°, mouiller°, enfoncer°, fourrer° et même farcir°) - à vrai dire il ne reste plus grand-chose.

° suivi du rire adéquat, gaussé en soulevant les épaules et en cherchant des regards approbateurs.

3-      Les femmes tu mépriseras

On aurait pu faire une sous rubrique de la précédente, mais finalement ca vaut un point complet.  Car entre  trou et boniche, nous n’avons pas trouvé de demi-mesure. A 50 ans, nous voila des momies.  A 30, des trous. A 45, « j’vais te faire couiner » (pour sur mon grand !). A 35 ans et deux enfants à charge, une menace pour les hommes.  Tout un programme.

4-      Gras du bide tu seras

A vrai dire, tout s’enchaine comme du papier à musique. Plus tu mets tes doigt dans la sauce chéri, moins tu vois tes orteils. Plus ta quequette disparait sous ton bide, moins les femmes te défroquent. Plus les femmes se font rares, moins tu es content. Plus t’as chaud à l’entre jambe, moins tu veux me voire suer torride devant les fourneaux à ton égal. Et la, sans même que tu t’en rendes compte, tu es devenu un gros prolo en blouse blanche et tu cries « retourne à la plonge ! ». Comme quoi hein, ça tient à rien.

J’ai cherché chez mes collègues hommes et femmes l’opposé de « misogyne » pour m’en taxer moi-même mais figurez vous qu’un tel terme n’existe pas dans le conscient général. Il m’a fallu aller sur wikipédia pour découvrir que la « misandrie » est un sentiment sexiste d'aversion pour les hommes en général, ou une doctrine professant l'infériorité des hommes par rapport aux femmes. Mais alors que la misogynie est un concept connu et reconnu, qui a entendu parler de la misandrie ? vazy, envoyez des mails.  Heureusement, il y a au moins un homme dans notre team, un vrai. Ouf.

Comments

[guiguite]

dis moi camionnette, c'est qui le vrai homme? pas tonnerre mécanique quand même! tu peux m'envoyer la réponse par mail et sous pli discret si tu veux....

[guiguite]

c'est bien, c'est bien mais tout de même n'oublie pas que gras du bide m'a promis de me faire couiner toute la nuit et c'est peut être pas une promesse en l'air.
Ah tu as oublié les cours d'anglais où on dit goose en ricanant et stuffed aussi....